Discipline réunissant des compétences de médecine périopératoire et en médecine intensive, l’anesthésie-réanimation est à la fois complexe et délicate. Le diplôme pour exercer ce métier est obtenu seulement après 5 années de spécialisation. De nombreux candidats choisissent cette voie. Cette discipline fait partie des 10 premières disciplines très prisées par les étudiants. Et pourtant, de nombreux services de médecine intensive ont récemment déploré un certain manque dans ce secteur et les offres d’emploi pour anesthésiste réanimateur pleuvent. Les constatations (par le CNP-Mir : Conseil National Professionnel Médecine Intensive Réanimation) ont été faites : il manque au moins un poste à chaque service. La même enquête a révélé que le nombre de postes de médecins anesthésistes-réanimateurs qui restent vacants atteint plus de 300 en France. Cette pénurie aurait connu une augmentation de 198 % en seulement 10 ans… Pourquoi et comment ? Voici quelques explications…

Rappel sur le rôle d’un médecin anesthésiste-réanimateur

L’anesthésie-réanimation est une spécialité médicale consistant à administrer de l’anesthésie aux patients avant un acte chirurgical. Ce professionnel prend également en charge les services de réanimation et la surveillance de patient. Les soins prodigués par ces médecins sont qualifiés de « soins critiques ». Ils prennent également en charge les patients dont le pronostic vital est engagé.

Pénurie d’anesthésistes-réanimateurs : causes et conséquences

Les anesthésistes-réanimateurs sont des professionnels hautement qualifiés. Le manque de personnel est constaté partout. Ce qui provoque de nombreuses plaintes au niveau de l’organisation des services et surtout auprès des familles : annulation de dernière minute, longues files et plusieurs heures d’attentes… De nombreux chirurgiens sont contraints d’annuler ou de reporter leurs interventions à cause de cette pénurie et les salles d’opération restent vides alors que des patients attendent d’être sauvés. Pour les chirurgies compliquées, telles que les opérations pédiatriques, il n’est pas envisageable d’engager des intérimaires qui n’ont pas eu de formation spécifique. Mais pourquoi ce grand manque ? :

La pandémie du Covid 19

L’augmentation des besoins d’hospitalisations en « soins critiques » a été explosive pendant la crise sanitaire. Les lits d’hôpitaux ont été multipliés et de nombreux efforts ont été réalisés, mais en vain… La pénurie structurelle de médecins anesthésistes-réanimateurs reste une triste réalité. Avec la pandémie, des « réanimations éphémères » ont vite remplacé les opérations chirurgicales programmées et ont ainsi occupé certains blocs opératoires et salles de réveil… La pandémie a fait que les vrais problèmes de manque de personnel médical soient soulevés. Le problème concernant les conditions de travail difficiles auquel les médecins intensifs ont toujours fait face a été seulement accéléré par la crise. Les médecins ne veulent pas travailler dans de telles situations…

Les difficultés du terrain

Sur le terrain, les professionnels de la santé ne sont pas épargnés par le stress permanent, en atteste le rapport du cairn. Le burn-out est un danger qui guette chaque expert à tout moment. Harcèlement par la famille, troubles anxio-dépressifs, épuisement, conduites addictives… Les chirurgiens et les anesthésistes-animateurs sont dans la ligne de mir de ces détresses. Selon les sondages, 1 chirurgien sur 3 et un anesthésiste sur 3 se plaignent du rythme infernal qu’il vive chaque jour et nuit. Ainsi, les médecins diplômés sont de plus en plus nombreux à décliner l’offre d’exercer dans le secteur. D’où la croissance de cette démographie médicale des anesthésistes-réanimateurs. Le nombre de postes vacants ne cesse d’augmenter…

Concurrence et le numerus clausus

Des postes vacants et le nombre d’internes formés restent le même depuis une dizaine d’années… Voilà une autre cause évidente de cette pénurie en médecin anesthésiste-réanimateur. Rappelons que cette réduction a connu une baisse drastique entre les années 1985 et 2000. Ce numerus clausus a été élargi en 2004, mais l’effet négatif persiste. Le CNP-Mir a d’ailleurs constaté qu’un quart des services intensifs en réanimation ont des postes d’internes non pourvus (300 postes vacants), alors que le nombre des internes formés ne connaît toujours pas de hausse.

L’un des facteurs aggravants de cette situation de manque de médecins anesthésiste-réanimateur est la concurrence. Le secteur privé n’hésite pas à séduire les jeunes diplômés à joindre leurs équipes : meilleures conditions de travail, meilleurs revenus… Ils s’y sentent également mieux reconnus pour leur sacrifice quotidien.

Le départ à la retraite

Ajoutons à ces facteurs le départ imminent des médecins réanimateurs qui ont aujourd’hui déjà plus de 60 ans. Toujours selon l’enquête menée par le Conseil National Professionnel Médecine Intensive Réanimation, il y aurait environ 300 médecins qui devront bientôt partir à la retraite. À ceux-là s’ajoutent les 300 autres postes non pourvus… De plus, le nombre de professionnels qui optent pour une activité à temps partiel atteint les 38,6 % dont 9,1 % font partie des services de réanimation.